Depuis le début de la crise sanitaire, CHF 1.4 million d’aides financières et alimentaires ont été distribuées par le CSP Vaud et Caritas Vaud aux personnes précipitées dans la précarité et n’ayant pas droit aux aides sociales. Cette aide, provenant de privés, ne peut toutefois pas être garantie sur le long terme. Lors de la conférence-débat organisée le 29 octobre, les deux associations caritatives appellent à une évolution du cadre légal et à la création d’un observatoire cantonal de la précarité.
La crise du coronavirus a mis en lumière, dès le mois de mars, la précarité de milliers de personnes dans le canton de Vaud. Les profils sont divers : les personnes sans-papiers qui contribuent activement au bon fonctionnement de notre économie, les étudiant∙e∙s qui financent leurs études par des petits boulots payés à l’heure, les «petits» indépendants ou encore les personnes et familles vivant avec des revenus juste au-dessus des normes d’intervention sociale. Ce printemps, du jour au lendemain, ils ont été précipités dans la précarité, certains sans aucun droit à l’aide sociale.
Fonds d’aide d’urgence
C’est pour venir à leur secours que Caritas Vaud et le CSP Vaud ont constitué un Fonds d’aide d’urgence privé dès le 1er avril 2020. Autonomes financièrement en temps normal, ces milliers d’inconnus des services sociaux ont dû faire appel à ce fonds pour garder un toit sur leur tête et se nourrir.
La conférence-débat organisée par le CSP Vaud et Caritas Vaud le 29 octobre dernier a rappelé les difficultés de cette population précarisée et détaillé les aides qui leur ont été octroyées. L’accent a également été mis sur les contraintes légales qui empêchent de venir en aide à tout citoyen dans le besoin, comme l’exige l’article 12 de la Constitution fédérale. Lors de son intervention, Fabrice Ghelfi, Directeur de la Direction générale de la cohésion sociale du canton de Vaud, a souligné le maintien de l’aide sociale pendant la crise, qui est restée dans le cadre légal comme la loi le commande : « Les prestations sociales publiques ne peuvent être octroyées sans sortir de l’anonymat ». M. Ghelfi reconnaît néanmoins que toute mesure qui consisterait à suivre et comptabiliser les non-requérants à l’aide sociale – telle qu’un observatoire cantonal de la précarité – serait bienvenue.
Non-recours aux prestations
Le non-recours aux prestations, c’est d’ailleurs ce qui frappe le plus le chercheur et professeur à la HES-SO, Jean-Pierre Tabin, intervenant à la table ronde. Il estime que de nombreux problèmes pourraient être résolus avant que la situation d’urgence n’apparaisse, notamment en accordant le subside à l’assurance maladie automatiquement, et non sur demande. « Les personnes ne font pas appel aux aides proposées par manque d’information, à cause de la complexité du système, et aussi pour ne pas mettre en danger leur statut légal ».
Karine Clerc, Municipale à la direction Enfance et cohésion sociale de Renens, voit dans cette obligation de répondre à l’urgence une opportunité de changer de regard, à défaut de changer le monde … « On sait qu’une partie de la population est là sans droit. On ne peut plus les ignorer. La crise a montré qu’on pouvait les aider, alors pourquoi ne pas le faire en dehors de la crise ? »
Au vu de ces éléments, le CSP Vaud et Caritas Vaud rappellent que ce ne sont pas aux institutions privées et aux particuliers – via la Chaîne du bonheur – de venir en aide à ces personnes précarisées. Ils appellent à une évolution nécessaire du cadre légal afin que celles-ci soient intégrées dans les processus d’aides sociales publiques. « La crise a révélé qu’un pan entier de notre population passait entre les mailles du filets – il en va de la responsabilité des autorités fédérales et cantonales de trouver une solution simple et ouverte pour qu’une telle crise ne puisse plus se reproduire » exhortent conjointement Pierre-Alain Praz, directeur de Caritas et Bastienne Joerchel, directrice du CSP Vaud.
Cette conférence-débat du 29 octobre 2020 est visible sur les chaînes Youtube de Caritas Vaud et du CSP Vaud.