La traite des êtres humains chez les hommes

Dans les cas de traite, on déshumanise les victimes, on exploite leur fragilité économique et administrative en proférant des menaces, en leur confisquant leurs papiers, on les manipule en faisant du chantage. Il existe un faisceau d’éléments qui permet de soupçonner une situation de traite d’êtres humains.

Leila Boussemacer, avocate au Service d’assistance aux victimes de la traite du CSP Genève

Alexei (prénom d’emprunt) a travaillé pendant plusieurs années sur des chantiers à Genève, avec des horaires abusifs, un salaire quasiment inexistant, logé dans des conditions d’insalubrité choquante. En 2017, après avoir été tabassé par son patron, il est orienté par le centre d’aide aux victimes LAVI vers notre Service d’assistance aux victimes de la traite des êtres humains (TEH), qui le suit depuis dans ses démarches juridiques et sa reconstruction.

Entre 2014, date de sa création, et 2017, notre service d’assistance a pris en charge 11 hommes victimes de TEH. Ils sont désormais 66 à y être suivis. C’est notamment grâce à notre travail d’identification et de plaidoyer que de plus en plus de cas de traite sous la forme d’exploitation de la force de travail sont dénoncés.

Assurer la sécurité des victimes, notamment par un logement adapté

Six ans après les faits, reconnu comme victime de traite d’êtres humains, Alexei ne bénéficie que d’une autorisation de séjour temporaire, le temps d’instruire le dossier. Sa plus grande préoccupation aujourd’hui concerne le logement: une fois libéré, en 2017, il a été obligé de loger à l’hôtel pendant deux ans. L’été dernier, il a même passé deux mois à la rue, avant de trouver enfin une chambre qu’on lui prête provisoirement.

Avec d’autres acteurs engagés dans la lutte contre la traite des êtres humains, le CSP Genève milite pour la création d’un foyer pour hommes victimes de TEH, sur le modèle du Coeur des Grottes, réservé à l’accueil des femmes.

Les victimes de traite ont besoin d’une protection très spécifique: elles ressentent une très grande insécurité et les mesures actuelles ne sont pas à hauteur du besoin.

> Lire l’article paru le 13 décembre 2023 dans la Tribune de Genève